De l’usage de l’impression additive (3D) dans les datacenters – Interview de Scott Green, 3D Systems

Avec l’arrivée des nouvelles architectures d’IA et des solutions thermiques haute performance, la complexité de la distribution des fluides pour le refroidissement amène un nouvel intérêt pour la fabrication additive métallique (impression 3D). DCmag s’est entretenu avec Scott Green, Solutions Leader chez 3D Systems.

Il y a un an à peine, les experts de l’industrie prévoyaient que la densité énergétique atteindrait 100 kW par rack d’ici 2028. Lors de la dernière conférence GTC, NVIDIA a remis en question ces prévisions en annonçant que sa nouvelle architecture IA devrait atteindre jusqu’à 140 kW par rack, soit une hausse x5 par rapport à l’architecture précédente, et x10 par rapport aux racks CPU/GPU traditionnels.

Cette accélération de la consommation énergétique et de la chaleur générée oblige les datacenters à repenser en urgence leurs infrastructures électriques et de refroidissement. NVIDIA a d’ailleurs annoncé que le refroidissement liquide devient la norme pour ses systèmes IA, ouvrant un nouveau marché stratégique autour des solutions thermiques haute performance.

La montée en complexité avec les architectures multi-die (CPU, GPU, RAM sur une seule carte) impose de nouveaux défis : maintien des performances dans des chaînes de refroidissement en série ; distribution optimisée des fluides ; réduction du nombre de composants ; sécurité, efficacité et compacité accrues.

C’est dans ce contexte que la fabrication additive métallique se démarque. Déjà utilisée depuis près de 20 ans dans l’équipement pour semi-conducteurs, elle permet +80 % d’uniformité thermique, x5 plus rapide pour atteindre la température cible, et x500 de surface de refroidissement par rapport aux dissipateurs classiques.

DCmag – Le problème de l’impression additive n’est plus l’impression, mais les matériaux, en particulier pour la production d’objets qui transportent des fluides…

Scott Green – Il existe plusieurs façons d’obtenir une pièce de fabrication additive métallique. Certaines de ces méthodes sont indirectes et peuvent donner des résultats différents du point de vue de l’intégrité des composants. Historiquement, même les méthodes directes à impulsion laser présentaient des inconvénients, comme la disponibilité des matériaux, la densité et la stabilité à long terme. Cependant, au cours des cinq dernières années, le nombre de matériaux compatibles avec la fusion laser sur lit de poudre a explosé et, parmi les fournisseurs de machines, la densité et la qualité des pièces imprimées directement sur métal ont augmenté pour dépasser la qualité du moulage et être presque équivalentes, en termes de résultats, aux billettes usinées.

L’impression laser directe en métal vous offre une grande souplesse de conception et la possibilité de produire des parois étanches et des caractéristiques fines jusqu’à 0,1 mm dans des matériaux hautement conducteurs, tels que le cuivre commercialement pur sans oxygène (OFPC), le cuivre-chrome-zirconium (CuCrZr) et de nouveaux aluminiums à haute conductivité.

Se pose également la question de la certification de ces matériaux et objets, et de l’assurantiel…

Dans tous les segments industriels qui découvrent la fabrication additive (AM) et se mettent au diapason, des questions et des analyses fondamentales sont toujours nécessaires pour établir une confiance de base dans le processus. Il est tout à fait normal de se poser des questions sur l’équivalence d’un produit final fabriqué de manière additive par rapport à un produit créé à l’aide d’une méthode de fabrication traditionnelle utilisée depuis des décennies. Un nombre important de tests et de métallographies sont appliqués aux produits créés à l’aide de l’impression 3D métallique, dans de nombreuses industries, afin d’en assurer l’acceptation et la certification.

Les pièces métalliques imprimées en 3D sont utilisées depuis près de 20 ans dans les biens d’équipement pour semi-conducteurs, tels que les applications de lithographie, de gravure et de dépôt. Déjà reconnue pour son utilisation dans des applications très exigeantes où les défaillances ont des conséquences financières considérables, la fabrication additive métallique peut certainement s’avérer essentielle pour améliorer les performances de refroidissement dans des applications moins exigeantes telles que les échangeurs de chaleur des unités de distribution du liquide de refroidissement, les collecteurs et le refroidissement direct des puces.

Les banques d’objets 3D sont-elles disponibles dans le data center ? Pour tous les équipementiers ?

C’est une bonne question. Il n’existe pas de banque de composants d’échange thermique standardisés que les centres de données peuvent commander comme dans un catalogue de pièces détachées automobiles ou chez McMaster Carr. Nous travaillons plutôt directement avec les fournisseurs de solutions ou de systèmes pour concevoir des produits plus efficaces afin de répondre aux exigences toujours croissantes en matière de puissance et de dissipation de la chaleur. Je peux sans aucun doute imaginer un avenir proche où la fabrication additive sera un élément clé de l’écosystème du refroidissement et où nous nous rapprocherons des produits standards disponibles sur le marché mais fabriqués par impression 3D.

Avez-vous des business cases ou des usages concrets de datacenters à partager ?

Nous avons déjà plusieurs clients spécialisés dans le domaine de l’IA haut de gamme, mais nous ne sommes pas en mesure de communiquer de détails pour l’instant. Ce que je peux toutefois dire, c’est qu’à l’heure actuelle, les solutions thermiques issues de la fabrication additive (AM) sont considérées comme une arme secrète pour lutter contre l’augmentation constante de la puissance de conception thermique (TDP) et la complexité croissante des systèmes de refroidissement fabriqués traditionnellement. Un nombre important de composants peut être consolidé dans un produit AM bien conçu. Vous pouvez supprimer les jonctions de raccords et passer à des refroidisseurs consolidés d’une seule pièce sans aucun point de défaillance. En outre, du fait des limites dans les collecteurs actuels et la technologie de distribution des fluides, les sources de chaleur sont généralement refroidies en série et en boucle. Grâce à la fabrication additive, vous pouvez concevoir des solutions qui assurent un refroidissement parallèle de nombreux composants, en veillant à ce que chaque source de chaleur reçoive le fluide le plus froid, T0, à tout moment.

Où sont les RoI sur ces usages ? Y a-t-il un plafond de rentabilité de l’impression additive dans le data center ?

Le retour sur investissement dans ces cas d’utilisation est lié à un rapport prix/valeur relatif. Pour les applications CDU, le retour sur investissement peut être assez clair, l’augmentation de la capacité de refroidissement et au cœur du système est un simple calcul de retour sur investissement. Pour le refroidissement direct de puces, la valeur que vous tirez d’une solution de fabrication additive devient beaucoup plus claire lorsque vous pouvez la relier à la protection ou à l’amélioration d’assemblages de baies très coûteux. Par exemple, lorsqu’une unité de rack Blackwell entièrement chargée coûte près de 400 000 dollars et qu’un centre de données en possède des milliers, le coût d’un refroidisseur bien conçu pour la fabrication additive pour chacune de ces unités est minime par rapport au coût de l’unité elle-même. Il peut également être considéré comme un mécanisme de protection permettant de faire fonctionner les équipements informatiques en toute sécurité et sur la durée, prolongeant ainsi la durée de vie de l’équipement dans son ensemble. Si vous considérez le refroidissement à haute performance sous un angle différent, vous pouvez également dire qu’il y a une réduction de la consommation d’énergie, si vous n’avez pas de charges thermiques accrues et que vous excellez dans le refroidissement des composants actuels, et non des composants futurs, vous pourriez le faire de manière plus efficace en utilisant moins d’énergie.

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