Par Marion Porée, Cost Manageur, et Matthieu Gallego, Directeur associé, Project Director & Project Advisor, Data Centre and Manufacturing, chez Turner & Townsend
« Si on veut connaître un peuple, il faut écouter sa musique. »
Retranscrit dans un cadre professionnel, Platon abordait déjà la notion d’écoute. Une écoute active de nos collaborateurs, de nos clients qui, à l’instar de l’innovation, amène au cœur du Value Engineering. Or, qu’est-ce que le VE ? En quoi consiste-t-il ? Et pourquoi l’utilise-t-on ?
Qu’est-ce que le Value Engineering ?
Loin des procédés purement arithmétiques, le VE est une méthode simple et à la fois complexe mêlant jeu d’analyse et de recherches à la compréhension des besoins, à la volonté de leadership, tout en sachant accompagner adroitement son client.
Dans cette habileté d’écoute se dessine le recadrage d’un budget alloué à un projet. Une estimation supérieure à l’enveloppe budgétaire ou la nécessité de restreindre finalement les coûts, malgré le respect du budget initial, peut justifier l’utilisation du Value Engineering. Un phénomène dépeint en cinq points ci-dessous :
- Ponctuel ou cyclique
- Décidé par le maître d’ouvrage ou son équipe technique et/ou design
- Pratiqué dès le début du projet jusqu’à la définition claire et définitive des besoins
- Qui a pour but de réduire le montant initial par un objectif précis
- Le tout en garantissant la technicité, la sécurité et le standing demandé
Néanmoins, comment s’assurer de sa réussite ? De quelle manière accorder succès à la baisse de budget ? Prenons le sujet sous un autre angle et déterminons le Value Engineering comme une optimisation des coûts.
Ici, dans le cadre d’un Data Center, l’économiste en charge de cette tâche cible dans un premier temps ce qui ne peut être négociable (par exemple les éléments structurels ou emblématiques du projet). En résumé, il ou elle définit, grâce à l’écoute de son client et de son équipe, les attentes immuables. A l’image de la structure d’une construction neuve, l’économiste s’abstient de toucher aux marques des groupes électrogènes ou à la dimension des climatiseurs dans un DC et va plutôt véhiculer ses recherches vers le second œuvre, c’est-à-dire, tout ce qui pourrait éviter l’intervention d’un BET.
Dans un second temps, l’économiste identifie rapidement les postes les plus onéreux, les options pouvant être supprimées, les matériaux remplaçables par d’autres plus abordables et etc. Le but étant d’aller chercher l’économie en préservant l’esprit du projet.
En parallèle, il ou elle peut s’appuyer sur une des méthodes les plus infaillibles au sein du Value Engineering : le Six Sigma, très utilisée au sein de l’industrie et du Supply Chain. Un principe qualitatif qui tend vers un lissage parfait d’un processus, en d’autres termes, qui valorise au maximum sa fluidité. Cette démarche doit être approuvée par le client et nécessite des indicateurs de production fiables et mesurables, toujours dans le but de réduire les coûts tout en garantissant et/ou en améliorant la qualité du programme.
Mettre en avant la technique et l’innovation
Cette méthode est également l’occasion d’apporter son savoir-faire via ses connaissances techniques mais surtout par la présentation d’innovations. Nous y voilà, bienvenu au centre du Value Engineering. En effet, la recherche de l’innovation présente de multiples avantages :
- Un gain de temps et une facilité de mise en œuvre :
Le VE permit de réduire la durée du projet de 12 mois (17% du temps de travail prévu) ainsi que d’économiser 43 millions de dollars (6% du coût du projet)
- Une meilleure gestion des ressources :
Trois études de VE combinées ont permis la réduction de 54.2millions de dollars (21% du coût du projet).
- Une optimisation du design :
L’optimisation du design du projet permis d’augmenter les performances et la fluidité du trafic des nouvelles infrastructure pour un coût limité de 200,000 dollars (projet global 32 millions de dollars).
L’innovation inscrit l’équipe technique dans une démarche moderne, démontre sa flexibilité, son aptitude à se démarquer de ses concurrents, sa volonté forte de relever les défis techniques et financiers. Elle devient alors la vitrine du savoir de l’entreprise. Il suffit donc à l’économiste d’y puiser les idées adaptées, de suivre les progressions du marché et d’y trouver les meilleures plus-values, contribuant à l’optimisation du projet.
Une application concrète dans le Data Center
Le data center est un des domaines, avec l’industrie pharmaceutique et les entrepôts industriels, où le Value Engineering trouve une de ses applications les plus techniques. Dans ce secteur les dépenses touchant la partie mécanique et électrique représentent plus de 60% du budget total d’un projet. Cela concerne essentiellement les projets de construction de Data Center sur terrain vierge.
Ce budget exclut le coût des serveurs, rarement intégré dans ces projets, qui représente cependant un pourcentage important des montants finaux.
Régulièrement appliqué dans les projets de Data center dès la phase Business Plan, le Value engineering s’applique au cours de l’avant-projet dans une démarche globale d’optimisation des configurations électrique et mécanique. Afin de respecter le cahier des charges client, qui demande fréquemment une remise en question pour être optimisé, il est indispensable de ne pas « sur-dimensionner » les systèmes comme ne pas ajouter des groupes froids pour une redondance en N+2 alors qu’une N+1 est par exemple demandé. Dans le cas d’un design selon les principes de l’Uptime Institute, il est primordial de respecter les critères stricts du Tiering (voir ci-dessous) dans le but de garantir la certification du projet.
Une fois le concept global du design optimisé, le Value Engineering guide le projet selon les principaux critères du « Time to Market » (date à laquelle le data center est pleinement opérationnel) qui réduit au maximum la gestion des coûts, garantissant ainsi la qualité finale du produit.
C’est souvent à ce stade que le BIM fait son introduction dans le projet. En effet, cette maquette numérique est devenue un élément incontournable pour ceux souhaitant adopter une future transition du Value Engineering.
En créant en 3D toutes les interfaces du Data Center et en faisant interagir les connections énergétiques, il est aisé de déterminer à la fois la consommation du DC en question, mais également d’identifier bien plus rapidement les éléments interchangeables, permettant une réduction des coûts et ce, dès le début du projet. Dans le VE, un processus tel que celui-ci accélère l’adaptation des solutions et du design, rend l’impact des changements visuel, augmente la prise de décisions et permet donc une meilleure rentabilité du programme dans son ensemble.
Evidemment, cela nécessite une prise de conscience collective, une volonté de progresser avec le BIM malgré ses imperfections actuelles et une main d’œuvre très qualifiée, aussi bien à l’aise sur la complexité d’un Data Center que sur la maîtrise des maquettes numériques.
Le Value Engineering peut être ainsi utilisé en amont et en aval de l’appel d’offre. Il se révèle être un outil décisionnel indispensable, aussi bien dans choix d’une stratégie que dans la sélection d’une entreprise.
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