Au cours d’une fusion-acquisition, les aspects financiers concentrent une grande partie de l’attention. Pourtant, une fois l’opération réalisée, le réel projet de transformation ne fait que commencer : les pièges sont nombreux et les ressources impliquées multiples. Pour coordonner l’ensemble du projet, en particulier la transformation des systèmes d’information, l’évolution des processus et la conformité, l’architecte d’entreprise est tout désigné.
Expert - Paul ESTRACH, Directeur Marketing Produit chez MEGA International
La fusion-acquisition : un projet humain, technologique et réglementaire
En théorie, une fusion-acquisition (ou Merger & Acquisition, M&A) est une opération permettant de consolider les positions du nouveau groupe ainsi créé. En pratique, c’est aussi un projet extrêmement risqué. Selon les sources, entre 50 % et 70 % en moyenne[1] aboutissent à un échec : au mieux, les objectifs stratégiques primaires ne sont pas atteints ; au pire, une scission est décidée pour préserver la pérennité des deux sociétés d’origine.
Pourquoi un tel constat ? Sur le terrain, les pièges sont particulièrement nombreux. Notamment parce que l’Humain, dans toute sa complexité, constitue l’un des éléments essentiels d’une opération de M&A : diversité culturelle dans les deux entreprises, résistance au changement qui peut apparaître au sein des équipes, etc.
En parallèle, la synchronisation, voire la rationalisation, des systèmes d’information et des processus ne va pas non plus de soi, alors qu’elle demeure indispensable à la bonne marche de la nouvelle entité. Là aussi, les projets sont généralement longs et délicats à mener, tandis que la migration des données et le maintien de leur qualité devront être assurés. Enfin, les questions de conformité ne sont pas à négliger. La nouvelle entité doit respecter les normes et règlements en vigueur dans tous les territoires couverts par ses activités.
Prioriser les projets de synchronisation : premier chantier post fusion-acquisition
Outre les aspects humains à traiter en fil rouge jusqu’au succès de l’opération, les nombreux défis liés à la synchronisation des systèmes et à l’alignement des processus, ainsi que les nouveaux impératifs de conformité nécessitent l’établissement de priorités. Et contrairement aux idées reçues, ces priorités sont loin d’être évidentes.
On va naturellement se focaliser en premier lieu sur les processus critiques de l’organisation (tel que l’octroi de crédit pour une banque) et les systèmes d’information qui les supportent, car ce sont ceux qui ont un impact financier ou d’image fort pour l’organisation. Mais cette première priorisation devra être pondérée avec d’autres critères portant sur les risques de ce projet de transformation.
Car les obstacles peuvent être nombreux et liés à la complexité technique de l’intégration systèmes : risque d’interruption de service, de perturbations opérationnelles, d‘incidents de sécurité ou encore de conflits culturels, qui peuvent avoir des conséquences graves pour l’entreprise en termes de chiffre d’affaires, de coûts ou d’image.
Parmi tous les sujets à considérer, la conformité réglementaire est généralement prioritaire. Avec un objectif : minimiser les risques juridiques sur tous les territoires d’activité de l’organisation sur son nouveau périmètre.
L’architecte d’entreprise au cœur du succès d’une fusion-acquisition
L’interdépendance des projets d’harmonisation des processus et d’intégration des équipes, comme des systèmes, constituent l’essence même de la réussite (ou non) d’une fusion-acquisition. Positionné à la croisée des chemins de l’entreprise et doté d’une vision d’ensemble, l’architecte d’entreprise dispose de toute la légitimité pour organiser et faire aboutir les projets post fusion-acquisition.
En amont, il sera en mesure de comprendre les objectifs stratégiques des transformations à opérer, en accord avec la Direction. Il pourra ainsi participer à l’élaboration de la feuille de route d’intégration pour assurer une gestion du changement sereine.
En phase de fusion-acquisition, comme dans le cadre de ses missions traditionnelles, l’architecte d’entreprise va tout d’abord analyser les organisations existantes (architectures informatiques, systèmes, données et processus des deux entreprises), avant d’identifier les synergies et les redondances. En fonction de la criticité des processus et composants, il pourra définir les priorités d’intégration. Il procèdera dans un souci de stabilité opérationnelle et de conception d’une architecture cible adaptée à la nouvelle entité fusionnée, selon les meilleures pratiques et les technologies émergentes.
Plus globalement, c’est dans son rôle de coordinateur que l’architecte d’entreprise pourra démontrer toute sa valeur dans le cadre d’une fusion-acquisition. Outre un travail permanent avec les équipes de la DSI, c’est lui qui va organiser et planifier la migration des données avec les équipes data (data gouvernance, data architectes). Cela permettra d’assurer la qualité, l’intégrité et la sécurité des données.
De même, une collaboration étroite avec les équipes Risques et conformité garantira à la nouvelle architecture un respect strict des réglementations et exigences légales.
Dans un contexte de fusion-acquisition, l’architecte d’entreprise est donc un véritable facilitateur. Il réduira considérablement les risques d’échec, trop souvent constatés, à plus ou moins long terme, dans les opérations de fusions & acquisitions.
[1] Akoya Consulting 2019, Harvard Business Review, McKinsey,