L’acquisition puis la transformation d’un navire de 20 ans en câblier répond aux attentes d’un marché spécifique, celui des câbles sous-marins, en forte progression. Mais cela durera-t-il encore longtemps ? Dans ce second article consacré au câblier Ile d’Yeu de l’ASN, nous avons analysé le marché et donné la parole à Paul Gabla, directeur commercial et marketing d’Alcatel Submarine Networks (ASN).
Les câbles sous-marins sont un élément vital de l’économie. Ils sont largement utilisés pour les applications d’alimentation électrique et de communication. Dans ce dernier domaine, environ 97% du trafic Internet mondial dépend entièrement des câbles sous-marins, et avec l’essor d’Internet, la demande augmente considérablement.
La taille du marché mondial des câbles sous-marins a été estimée à 27,57 milliards de dollars en 2022 (source : Grand View Research) et elle devrait croître à un taux de croissance annuel (TCAC) de 5,9% de 2023 à 2030 (6,8% pour le seul créneau des câbles de communication, qui représente 62,45 % des revenus du secteur). Le marché intègre les câbles de communication, mais également les câbles de transport d’électricité vers les plateformes pétrolières, depuis les parc éoliens, ou encore les connexions inter-pays et insulaires des réseaux électriques de forte à faible puissance.
Le marché des câbles sous-marins de communication
Le marché des câbles sous-marins de communication était détenu historiquement par les opérateurs télécoms. Mais depuis une dizaine d’années, les Gafam ont émergé. “Ils sont devenus nos premiers clients, constate Paul Gabla (photo en entête), directeur commercial et marketing d’Alcatel Submarine Networks (ASN). Ils investissent seuls ou en consortiums”.
La multiplication des câbles de communication répond à la forte demande liée à l’augmentation du trafic des données. C’est ainsi que Google, Meta (Facebook), Amazon et Microsoft sont devenus les principaux acteurs des câbles sous-marins. Google possède 10 433 miles de câbles sous-marins à l’international et 63 605 miles en consortium avec Facebook, Amazon et Microsoft. Meta possède 57 709 miles, Amazon 18 987 miles et Microsoft 4 104 miles de câbles sous-marins.
Après un ralentissement en 2022, lié aux déconvenues des acteurs du cloud public en bourse, le marché des câbles sous-marins est reparti à la hausse. Il faut bien apporter des réponses à la croissance de 30% à 40% de la donnée. “Le marché a doublé, et ASN en assure un tiers. Mais va-t-il rester ou progresser ? Nous préférons adopter une analyse prudente, et nous pensons qu’il a atteint un palier”.
“C’est le cas avec un plateau technique qui stabilise les réseaux à 24 paires. Mais il y aura de plus en plus de fibre. Nous allons vers les 1 Tbits/s, avec en nominal une capacité de 500 à 600 Tbits/s. Nous allons continuer d’augmenter le nombre de paires de fibre en multiplexe. Et la fibre multi-cœurs est en phase d’expérimentation.”
Que deviennent les câbles anciens ?
Les câbles sous-marins ont une durée de vie de 25 ans minimum. La question du dé-commissionnement des anciens câbles n’est donc pas encore d’actualité pour la majorité d’entre eux. Pour autant, “Certains États commencent à imposer contractuellement le retrait des anciens câbles s’ils sont remplacés par de nouveaux équipements. Mais le coût d’un bâteau est de 100 000 dollars par jour…”
Et lorsque nous évoquons des expériences d’analyse des fonds marins et de détection des tremblements de terre menées sur des câbles abandonnés, Paul Gabla tient à rappeler que pour les mener il faut alimenter le câble à partir des stations et que cela ne peut fonctionner que sur quelques dizaines de kilomètres. Par contre, “L’avenir est à l’installation de capteurs dans les boîtes des répéteurs pour mesurer les paramètres climatiques au fond de l’eau”.