L’énergie propre ne suffit pas : l’Europe doit construire plus intelligemment son réseau électrique pour assurer un avenir numérique

A mesure que l’Europe étend son empreinte technologique, boostée par ses efforts dans les domaine de l’intelligence artificielle, du cloud computing et de la transformation numérique, elle se heurte à un défi croissant en matière d’infrastructure : le réseau électrique.

Expert :  Jeff Wittich, Chief Product Officer chez Ampere Computing

Les récentes coupures de courant et les tensions énergétiques dans certains états de l’UE pourraient être des signaux d’alerte. Les sources d’énergie renouvelable comme l’éolien et le solaire sont essentielles à la décarbonation, mais elles introduisent de la complexité. Leur production variable impose de nouvelles contraintes aux réseaux, ces derniers étant encore en cours de modernisation et ne pouvant, dans la majorité des cas, suivre le rythme de l’accélération numérique.

La récente panne d’électricité en Espagne en est un exemple classique. L’opérateur de réseau public Red Eléctrica soupçonne que la panne ait été causée par une production d’électricité solaire inférieure aux prévisions, suivie d’une baisse de la production d’autres énergies renouvelables. La coupure a duré près de 18 heures, causant d’importantes perturbations.

Les défis liés au réseau ne sont pas rares. En Irlande, la croissance des datacenters est devenue si énergivore que l’opérateur national a alerté sur de possibles pénuries d’électricité, entraînant un moratoire sur les nouvelles connexions des centres de données dans certaines régions. L’ouest de Londres a connu un problème similaire : les contraintes du réseau ont conduit à la suspension de projets de construction de logements et de datacenters. Ces situations témoignent d’une réalité plus large : pour être ambitieuse, la croissance numérique doit être soutenue par des infrastructures capables de supporter le besoin énergétique.

L’Europe est aujourd’hui face à une décision cruciale : bâtira-t-elle un avenir numérique en harmonie avec la transition énergétique – ou en tension avec elle ?

Les énergies renouvelables ont été un facteur clé pour attirer des investissements massifs dans les datacenters en Europe. Les régions dotées d’un fort potentiel éolien et solaire se sont positionnées comme des pôles idéaux pour des infrastructures numériques durables. Pourtant, les récentes pannes de réseau démontrent que cette promesse a des limites. Croire que des énergies renouvelables peuvent suffire à garantir l’avenir des centres de données est sans doute trop réducteur.

Ainsi, la réduction de la consommation énergétique doit aller de pair avec l’expansion de l’offre d’énergie propre. L’un des leviers les plus efficaces et immédiats pour parvenir à réduire la consommation énergétique des datacenters réside dans la manière dont les serveurs sont alimentés.

Les centres de données représentent déjà une grande partie de la demande en électricité, et cette demande connait l’une des croissances les plus rapides au niveau mondial . Avec l’essor de l’IA et de l’apprentissage automatique à grande échelle, elle ne fera qu’accélérer. Selon l’Agence Internationale de l’Énergie, les datacenters consommeront plus d’énergie que le Japon d’ici 2030. Faire fonctionner des charges de travail d’IA modernes sur des processeurs obsolètes ou des architectures GPU énergivores n’est tout simplement pas durable – ni pour l’environnement, ni pour le réseau électrique.

Chez Ampere, nous concevons des processeurs en se fondant sur cette idée. Les puces sont conçues pour offrir des performances élevées tout en consommant beaucoup moins d’énergie, permettant aux datacenters de se développer de manière durable sans mettre le réseau à rude épreuve.

Dans le cadre de son engagement pour un avenir durable, Ampere a récemment rejoint la Coalition pour une IA durable en France, une initiative internationale visant à orienter l’innovation en IA vers une voie plus verte. L’objectif de la coalition est d’aider l’Europe à construire les bases d’une IA durable – sans compromettre ses objectifs climatiques et énergétiques.

Alors que les décideurs politiques, les fournisseurs d’infrastructures et les leaders technologiques planifient l’avenir numérique de l’Europe, le moment est venu de réévaluer la situation. Sans une stratégie pour améliorer l’efficacité du réseau à tous les niveaux, nous risquons de répéter les erreurs du passé : la croissance pourrait dépasser les capacités du réseau existant et l’innovation stagnerait sous le poids de ses propres exigences.

La transition énergétique et la révolution numérique se déroulent simultanément. La seule voie possible est de s’assurer qu’elles se soutiennent mutuellement – et non qu’elles se contraignent. Cela signifie concevoir des technologies qui consomment moins d’énergie sans freiner l’innovation. Pour construire un avenir numérique fort et durable, il faut commencer par fournir des capacités de calcul modernes et efficaces.

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