DCmag se lance dans l’exercice délicat des prédictions pour les datacenters en 2023… sans donner de priorité. Vos commentaires sont les bienvenus.
Porté par l’explosion de la donnée et de ses usages, la transformation durable et l’innovation, le datacenter est en évolution permanente, dominée cependant par des tendances fortes, l’efficacité énergétique et du refroidissement, l’automatisation, la puissance de l’IT, et toujours les attentes de réduction des coûts.
La sécurité énergétique
La crise énergétique, amplifiée par la crise ukrainienne, pousse les exploitants de datacenters à revoir leur stratégie d’approvisionnement. Et à réviser la contractualisation, souvent sous la contrainte de leurs fournisseurs, tout en limitant la hausse des coûts de l’énergie. Le stockage de l’énergie s’invite dans le débat, ainsi que la diversification des sources, jusqu’à ce qui en réalité est un retour aux sources de l’industrie, l’auto-production de l’électricité.
La durabilité et le retrait des combustibles fossiles
La pression des régulateurs, des clients, mais aussi des investisseurs, avec la priorité donnée à l’objectif zéro carbone dès 2030, incitent les exploitants à se détourner des énergies fossiles. Ils s’engagent sur les énergies renouvelables, souvent en détournant la problématique de la consommation de l’énergie provenant de sources carbonées par le biais des PPA. Mais c’est sur le secours que la transition est la plus rapide, avec les carburants HVO supportés par quasi tous les groupes électrogènes. Quant à l’hydrogène… à suivre, certainement, mais on peut s’interroger sur la maturité des projets. A suivre également le gaz et surtout le biogaz, qui devraient commencer à percer sur le secours comme la production locale, malgré la mauvaise presse liée à la crise ukrainienne.
Le refroidissement, de l’air au liquide
La révolution au cours de la dernière décennie est venue du free cooling, largement adopté avec ses deux effets, écologique par l’utilisation (gratuite) de l’air, et économique en réduisant a minima de 30% de coût de production dans le datacenter. Mais la densité des équipements IT ne cesse de grossir, tirée par des usages comme l’IA et le HPC, et la demande de puissance suit. Le refroidissement air ne suffit plus, le liquid cooling et l’immersion progressent.
Le déploiement hybride, edge et multicloud
Le système d’information se décline aujourd’hui en quatre couches : le legacy (physique dans l’entreprise), le cloud privé, le cloud public et le edge. Chaque couche repose sur une infrastructure, donc sur des datacenters. Les utilisateurs adoptent des approches hybrides, maintiennent une partie de leurs datacenters et salles informatiques pour les applications critiques, recherchent des hébergeurs pour les applications génériques, sont séduits par le cloud, et doivent répondre aux attentes de latence réduite, de capacités de calcul et de stockage de proximité, et aux impératifs de souveraineté. Une tendance cloud émerge également, le rapatriement des workloads du cloud vers les datacenters sur site ou en colocation.
L’augmentation de la densité
Les grosses places de marché des datacenters de colocation, la Virginie et la Valley aux Etats-Unis, les FLAP en Europe, affichent un phénomène en forte progression : le taux d’inoccupation ne cesse de se réduire. En moyenne, il passe sous la barre des 5%, il se rapproche même des 1% en Virginie du Nord. A la recherche d’espaces, les entreprises augmentent la densité des équipements IT, en moyenne en progression de 20%, et cette attente n’est pas prête de s’arrêter. Cette augmentation s’accompagne de nouvelles contraintes, élévation de la puissance électrique dans les racks, amélioration des flux d’air, adoption du liquid cooling et de l’immersion, optimisation de l’architecture des salles, élargissement des passages de câbles, etc.
L’eau
La consommation d’eau des datacenters est dans la ligne de mire de leurs opposants. Il faut dire que les pratiques des géants de l’hyperscale choquent, avec des consommations mesurées en millions de litres. Après le PUE, unité de mesure de l’efficacité énergétique du datacenter, la consommation et le WUE (Water Usage Effectiveness) deviennent des critères de mesure très observés, et fortement médiatisés et critiqués. Microsoft et Google en ont fait les frais.
La sécurité, du physique à la cyber
La sécurité physique est dans les gènes des datacenters. Le risque d’incendie demeure, même s’il est mieux maîtrisé, mais il suit l’augmentation de la densité. Le contrôle des accès doit faire face à la multiplication des personnels dans les salles. Et certains clients imposent aujourd’hui la présence de gardes devant les salles. S’y ajoute la cybersécurité, avec des équipements connectés et pilotés à distance qui élargissent la zone à risque. A suivre de près, le Secure Access Service Edge (SASE) devrait être largement adopté pour assurer une sécurité de point à point.
La pression RSE
L’environnement est l’affaire de tous… mais surtout des fournisseurs sur lesquels le clients mettent la pression pour remplir les cases de leurs engagements et résultats en matière de développement durable. La question RSE est montée aujourd’hui en tête des appels d’offres. Et les investisseurs imposent leurs conditions. Les datacenters n’y échappent pas, avec la difficulté de traiter le Scope 3, eux-mêmes clients de leurs équipementiers.
L’emploi
La pénurie de compétences, de formations, de techniciens n’est pas une prédiction, c’est un sujet récurrent. Qui soulève une question : que font les acteurs du marché pour apporter des solutions ? Notre prédiction sera plutôt que le sujet sera de nouveau présent en 2024…
La financiarisation
Le marché très actif du datacenter et la dimension des investissements sur le long terme ont rendu le secteur attractif pour les investisseurs et le capital-investissement. Les cinq dernières grandes acquisitions par des fonds ont totalisé plus de 50 milliards $. Le phénomène devrait se prolonger quelques années encore, le secteur se consolide, et les investisseurs vont jouer un rôle toujours plus important. Par exemple en participant activement aux négociations courantes, ce qui pourrait générer une pression nouvelle sur les exploitants.