Dans ce quatrième article sur le câblier ASN Ile d’Yeu, nous évoquons le mode opératoire des câbles, de la fabrication à la pose, en passant par le stockage et l’épissure.
- Merci au second capitaine Cédric Chavet (photo d’entête) de nous avoir accompagnés dans la visite de l’Ile d’Yeu dans sa dimension moins maritime que de pose du câble sous-marin.
Une fois que le projet est approuvé et que son financement est trouvé, il faut environ deux ans pour poser un câble sous-marin. La première année est consacrée à la reconnaissance bathymétrique pour repérer le trajet idéal, avec l’étude du chemin et des zones de pose du câble, l’analyse des fonds marins, l’obtention des différentes autorisations, etc. Paul Gabla, directeur commercial et marketing d’Alcatel Submarine Networks (ASN), évoque également la géopolitique et la polarisation du monde qui ne simplifie pas les tâches : “Il y a les problèmes de la Mer Rouge, les Etats-Unis qui refusent les constructeurs chinois, les Chinois qui ont fermé la Mer de Chine…”.
Une fois ces questions (presque) réglées, Alcatel fabrique intégralement le câble dans son intégralité, répéteurs inclus. Le câble offre quatre sections, avec au cœur les 24 paires de fibres. La section dépend de la protection qui entoure le coeur, épaisse sur la partie terrestre et bord de mer pour le protéger contre les plus gros risques, plus faible ensuite mais toujours fortement protégé, plus faible encore pour des profondeurs moyennes, et un câble blanc pour les hauts fonds. Le chargement du câble ainsi conçu peut prendre plusieurs jours.
Voici une des trois cales dans lesquelles les 15 000 km de câbles sont enroulés. L’opération est minutieuse, bien enroulé le câble se déroulera sans incident. Si ce n’est pas le cas, il pourra faire un ‘noeud’ de plusieurs tonnes, qu’il sera impossible de démêler, et qu’il faudra couper et rabouter, ce qui occasionneta la perte de plusieurs jours de pose.
Cette photo montre le câble qui va être posé à partir de Singapour vers les Etats-Unis. Au fond derrière les tubulures on distingue le câble blanc destiné aux hauts-fonds. La couche supérieur est un câble sans fibre uniquement destiné par son poids à maintenir en place le câble enroulé. la hauteur du câble fibre atteint ici 8 m.
Sur cette photo, prise depuis le centre de la cale, nous voyons clairement l’empilement des couches de câbles, du noir (en haut) pour la pose à proximité des côtes, au blanc pour les hauts-fonds. A gauche, du câble marine classique conservé ici pour les usages du bateau.
Lors du stockage du câble dans une cale, les répéteurs également montés sont extraits et montés dans l’immense hangar situé au dessus via un puits. la photo n’est pas de qualité, mais on voit le câble enroulé à droite, et les câbles reliés aux répéteurs au centre.
Photo de répéteurs : en bas ce répéteur, qui a servi à divers tests, est identique à ceux qui sont posés tous les 80 km ; en haut un répéteur Y, destiné à assurer une dérivation vers un autre câble ou une terminaison.
Voici comment les répéteurs sont stockés dans le hangar. Extraits d’une cale mais toujours reliés au câble dans son intégralité, ils sont entreposés dans un espace climatisé. Le fonds marin est à faible température constante, la climatisation maintient les répéteurs à une température proche du fonds où ils seront posés, ce qui évite des ruptures liées à des différences de température lors de la pose.
Au bout du hangar, coté poupe, ces deux systèmes extraient pour la grande roue le câble d’une cale et sur chemin de pneus derrière le répéteur placé dans l’axe de dépose.
Le câble sous-marin est enfin guidé vers ces passages de câble pour être immergés. Les rayures permettent de repérer visuellement l’angle que la câble en cours de pose marque avec le bateau. On notera la présence en jaune d’une charrue, qui immergée sur le fonds et tirée par le bateau est destinée à creuser une tranchée sur le fonds afin d’enfouir le câble.
Lors de la pose du câble, au départ ou à l’arrivée, l’Ile d’Yeu s’approche au plus près de la côte, jusqu’à un maximum de 5 m de tirant d’eau. La pose enterrée à terre et jusqu’au bateau dans une tranchée d’environ 2 m de profondeur est assurée par une équipe spécialisée indépendante du bateau. Si le fonds sédimentaire le permet, la charrue permet de continuer d’enterrer le câble d’environ 1 m à 1,5 m, et cela jusqu’à plusieurs kilomètres de la côte. Sur le reste du parcours, soit sur sa quasi totalité, le câble et les répéteurs sont posés sur le fonds.
Dans le prochain article, nous nous intéresserons au pilotage de la mission.