USA – Les hyperscalers veulent connecter leurs datacenters directement sur les centrales électriques

C’est la tendance chez les géants de la tech américains : conclure des accords avec les centrales électriques afin d’y brancher directement leurs datacenters. Mais la démarche soulève de plus en plus d’oppositions…

Une tribune d'Yves Grandmontagne, rédacteur en chef de Datacenter Magazine 

Cela en vous a pas échappé, alors qu’ils agrandissent ou multiplient leurs datacenters et qu’ils intègrent les infrastructures d’Intelligence Artificielle (IA), les géants de la tech rencontrent des difficultés pour sourcer leur électricité.

Il faut dire qu’aux Etats-Unis, les centrales électriques ‘privées’ peinent à atteindre la production engagée par les projets de datacenters. Mais surtout, le réseau électrique est au mieux déficient, au pire insuffisant voire inexistant pour répondre aux besoins des datacenters.

Un des problèmes majeurs rencontrés par les hypercalers porte sur les process de raccordement à un réseau électrique, potentiellement très longs (en moyenne plus de 4 années pour obtenir un raccordement sur un réseau saturé) et plus coûteux, et sur le manque de sous-stations, ces dernières figurent d’ailleurs régulièrement dans les nouveaux projets de construction.

Pour palier à ces faiblesses, les hyperscalers comme les colocateurs qui les supportent demandent à connecter leurs nouveaux projets de datacenters directement aux centrales électriques, voire s’implantent à proximité ou dans l’enceinte des centrales. Et dans tous les cas, ils cherchent à verrouiller leurs ressources par des contrats qui portent parfois sur une part importante de la production de ces centrales.

Les opérateurs de centrales électriques sont particulièrement satisfaits de ces accords, qui consolident leurs carnets de commandes. En particulier ceux qui disposent d’un parc nucléaire, long à rentabiliser, et qui enchaînent les difficultés financières.

Mais ce l’est beaucoup moins du côté des résidents comme des communautés urbaines : une production réservée par un campus de datacenters peut se traduire par des dizaines voir des centaines de milliers de foyers qui risquent fort d’être privés d’électricité, surtout l’hiver.

Les régulateurs locaux ou fédéraux se montrent également inquiets du risque que font prendre les datacenters hypercales, contractuellement prioritaires, sur la capacité et les priorités de distribution de l’électricité.

C’est toute l’ambiguïté du marché, en particulier aux Etats-Unis : le développement des datacenters accompagne la priorité donnée aux technologies d’IA, mais il met également à mal une production et une distribution saturées de l’électricité. Surtout quand ce sont les services publics qui financent les infrastructures.

Une décision est très attendue en la matière, qui pourrait s’imposer aux pratiques du marché : celle de la FERC, la Commission fédérale de réglementation de l’énergie, interpellée sur l’accord passé entre Amazon AWS et la centrale nucléaire de Susquehanna, dans l’est de la Pennsylvanie. L’accord entre le géant du cloud et la centrale prévoir à terme la consommation de 960 MW par le campus de datacenters d’AMW implanté au contact de la centrale, soit 40% de sa capacité de production.

Si la FERC rejette l’accord AWS/Susquehanna, cela pourrait remettre en cause certains projet actuels ou futurs en donnant corps aux opposants aux implantations de datacenters. Cela pourrait surtout inviter à légiférer sur ces questions. La nouvelle couleur politique de l’Administration Trump sera également à surveiller, car elle pourrait également influer sur l’évolution du dossier.

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