Trump met fin à l’ère de la mondialisation… Quel effet sur les data centers ?

Avec l’annonce d’une série de hausses de tarifs douaniers – dont 20 % pour l’Union européenne et 34 % pour la Chine – le président Trump a probablement bouleversé l’ère du commerce mondial. Sa stratégie va affecter les perspectives de croissance du secteur technologique. Et sa volonté de prolonger son mandat par tous les moyens pourrait prolonger longuement un déséquilibre commercial aux couleurs d’une guerre économique.

Quel sera l’effet des hausses de tarifs douaniers sur les entreprises technologiques ?

Il est difficile de répondre dans l’immédiat à cette question. D’abord parce qu’on ne sait pas encore s’il s’agit d’un coup de bluff du président Trump, ni si son entourage direct – on pense à Elon Musk – pourra supporter longtemps ses frasques économiques si elles nuisent à leur business. Le parterre de grands patrons du numérique qui a cédé aux pressions du président en l’adoubant le jour de son investiture s’en mord aujourd’hui les doigts. Quant à son discours d’une Amérique à nouveau riche et d’un âge d’or d’emplois manufacturier, il tient difficilement en dehors de son électorat redneck…

Les réaction des marchés tout autour de la planète, et en particulier aux Etats-Unis où l’indice dollar a chuté au plus bas depuis le début de l’année, en disent long sur l’accueil accordé à la nouvelle politique économique américaine. Et beaucoup d’inconnues demeurent, ce qui n’est jamais bon pour le climat des affaires !

Quelques faits, cependant, pour étayer notre analyse. Le premier est une évidence, la hausse des tarifs douaniers, associée à la hausse des impôts sur les sociétés (un volet peu évoqué dans les commentaires des médias de notre côté de l’Atlantique), va se traduire par une hausse des prix sur le sol américain. Qu’accompagneront les hausses des droits en représailles aux frontières des partenaires d’hier.

Et la chaîne logistique – fabrication en Asie, gestion aux Etats-Unis, commercialisation en Europe – risque fort de peser sur les investissements d’infrastructures. Alphabet (Google), Amazon, Apple, Meta, Microsoft, Nvidia, Tesla, pour évoquer les ‘Magnificent Seven’, tout le monde va passer à la casserole. Et il faudra bien assumer l’absorption des hausses de tarifs sans déplaire aux actionnaires ! Une longue période de hausses des coûts va s’ouvrir devant nous.

Donc, côté data centers, le principal effet attendu des hausses de tarifs douaniers imposées par Trump sera une inévitable hausse des coûts.

L’Union européenne a-t-elle les moyens de réagir ?

Les stratégies agressives de Trump d’appropriation des ressources rares de l’Ukraine comme du Groenland, ainsi que de ré-internalisation de la production sur le territoire américain, en disent long sur les limites d’actions du président américain comme des entreprises américaines. Egalement les vastes mouvements d’accroissement des investissements aux Etats-Unis engagés par TSMC, Foxconn, Compal, Inventec sur la fabrication des composants et des serveurs, ou plus proche de nous de l’allemand Siemens dans l’ingénierie, sont des signes forts.

Mais c’est surtout dans le domaine des services que pourrait porter la riposte européenne. Les Etats-Unis sont le premier exportateur de services, en particulier dans le cloud dont nous connaissons le lien avec les grands acteurs des data centers de colocation. Et ils ont enregistré un excédent commercial de 300 milliards de dollars.

En cas d’escalade de la guerre commerciale, l’Europe pourrait affecter des géants technologiques américains avec des instruments anticoercition comme des droits de douane, des restrictions sur le commerce des services et des limitations des aspects commerciaux des droits de propriété intellectuelle. Voilà qui changerait des tentatives de pénaliser les grandes entreprises du numérique pour leurs pratiques commerciales anticoncurrentielles, leur faible protection des données personnelles et leurs politiques laxistes de modération des contenus…

Une dernière inconnue européenne demeure : quel sera la position de la Grande-Bretagne ? Jouera-t-elle l’allégeance à Trump, ce qui la placera en position de force intermédiaire entre les deux blocs, ou la carte de l’Union européenne ? Londres occupe la première place des hubs de data centers européens. Mais ici encore, c’est probablement le président américain qui détient la réponse…

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